Andreu Estela Barnet.
Chef de l’Unité de Formation.
Ecole Judiciaire du Conseil Général du Pouvoir Judiciaire.
Profils professionnels comme instruments de diagnostique
[1]
Permettez--moi de commencer cette communication en vous expliquant un conte sufi ; un s´embarquer pour traverser un fleuve de grand débi, et peut-être pour se distraire il demanda au batelier : savez-vous de grammatique ? –non, monsieur, répondit celui-ci. –rendez-vous compte que vous avez peut être perdu la moitié de votre vie. Le batelier resta très affligé mais il s´abstint de répondre. Alors, un coup de vent fit naufrager le bateau et le batelier interrogea l´homme très sincèrement : -dites, monsieur : savez-vous nager ? –non, répondit le savant. –alors, rendez-vous compte que vous avez perdu la vie entière[2]. De ce conte, on peut tirer de nombreux et profonds apprentissages, mais je me centrerai sur un seul : à quoi nous sert la connaissance si nous n´avons pas les adresses et/ ou les habiletés pour pouvoir l´appliquer ? Je souhaiterais partager avec Vous la réponse à cette question à travers la présente exposition.
De plus en plus, la formation dans les entreprises, dans les organisations, publiques ou privées, a pour but de faciliter à leurs professionnels l´acquisition des connaissances, habiletés et attitudes pour que leur exercice soit adéquat à leurs nécessités et objectifs. De plus, certains aspects comme réaliser correctement sa tâche, pouvoir être transférés à d´autres lieux de travail ou s´adapter et s´intégrer dans la corporation ou groupe de travail, renforcent le professionnel à l´intérieur de l´organisation.
Aujourd´hui, on a surpassé les temps où la finalité des actions ou plans de formation destinait énormément de ressources à la formation pour arriver à un maximum d´employés, même si cette formation n´avait pas une incidence directe dans leur lieu de travail. Actuellement, on se trouve face à des politiques de formation qui cherchent la qualité plutôt que la quantité, et donc une formation appliquée plutôt qu´une formation théorique éloignée de l´exercice professionnel.
Par conséquent, on peut aujourd´hui comprendre et définir la formation dans une organisation comme le procès qui vise à éliminer les différences entre ce qu´un employé peut offrir à partir de ses habiletés, expériences et aptitudes accumulées, et ce qui est exigé conformément au poste de travail qu´il développe[3].
Pour que les programmes de formation aient du succès il faut également réaliser une bonne analyse ou détection des nécessités à tous les niveaux mentionnés : d´organisation, de tâches et personnel. De même, il faut impliquer le plus grand nombre possible de personnes dans le procès de détection des nécessités et éliminer les barrières qui empêchent de réaliser une bonne analyse. Finalement il faut choisir la combinaison des méthodes la plus convenable en prenant en considération ses avantages et ses inconvénients pour l´utiliser de la façon la plus effective.[4].
L´administration publique en général et celle de la justice en particulier, ne sont pas étrangères à toutes ces transformations. L´administration de la justice et ses opérateurs souffrent des changements constants et évoluent pour s´ajuster à de nouvelles exigences légales, politiques, sociales et économiques. Comme conséquence, les opérateurs de l´administration doivent se gérer et se former pour s´adapter d´une façon optimale à ces changements et obtenir la plus grande efficacité.
En Espagne, le siège de Formation Initiale de l´École Judiciaire du Conseil Général du Pouvoir Judiciaire, est le pont entre l´étape de l´examen- concours pour l´accès à la carrière judiciaire et l´intégration à la même par l´exercice de la fonction juridictionnelle. Pour obtenir les résultats souhaités, ajustés aux objectifs et en cohérence avec tout ce qu´on vient de dire, pour l´établissement de son Plan d´enseignement l´École Judiciaire part de la définition des compétences considérées nécessaires pour l´exercice de la fonction de Juge (dans notre cas comme Juge de Première Instance et d´Instruction) et le degré de maîtrise de ces compétences par les Juges stagiaires à leur arrivée à l´ École Judiciaire.
Comme le dit Rallo[5];
sans préjudice d´un curriculum académique et professionnel plus large dans des cas isolés, en Espagne les juges stagiaires sont des jeunes licenciés en droit qui ont réussi un examen-concours après avoir étudié pendant 4 ans de moyenne environ 375 thèmes des différents domaines du système juridique. En particulier, les exercices consistent d´abord en un test et puis deux expositions orales, mémoristiques, sur plusieurs thèmes du programme. Ainsi, par les élèves de l´École Judiciaire ont démontré des compétences sur des tâches très différentes de celle que la fonction judiciaire leur exige. L´auteur ne veut pas affirmer que les Juges stagiaires manquent des compétences pour la fonction juridictionnelle mais il semble évident que, à part les connaissances amplement certifiées, le Juge doit présenter certaines habiletés, attitudes et intérêts compatibles avec l´exercice de leur fonction. D´autres auteurs[6], on même qualifié le système comme cruel et inhumain, qui oublie l´aspect professionnel du juge, méconnaît les aptitudes logiques et d´application du droit et empêche une vision sociale et d´immersion dans la réalité à laquelle il s´applique”.
Le plan d´enseignement de l´École Judiciaire n´exprime pas de façon ouverte la nécessité se sauver la grande distance entre le concours et l´exercice juridictionnel, nécessité que cependant est sous-jacente dans les différents objectifs formatifs des projets d´enseignement de l´École.
Le problème, ou plutôt, l´ambiguïté, se pose car il n´y a pas une unanimité pleine sur quel doit être le profil du bon Juge[7] et on risque de confondre les souhaits ou les préférences individuelles avec les nécessités objectives et réelles. Pour corriger ce déficit et dans le but d´apporter des éléments pour objectiviser ce profil et pouvoir connaître d´une façon plus ou moins exacte de quel genre de «bon Juge » on parle, on a élaboré méthodologiquement le « profil des compétences » du Juge de Première Instance et d´Instruction, qui est la première destination des Juges diplômés par l´ École Judiciaire.
Dans l´ingénierie de la formation il y a différentes méthodes pour l´analyse occupationnel, c´est à dire pour l´élaboration de Profils professionnels par Compétences. L´Analyse d´organisation, l´Analyse fonctionnelle, les Échelles des Habiletés requises, l´entretien de Compétence, la méthode du Développement Systématique du Curriculum Instructionnel (SCID) ou méthode AMOD (« Un modèle » dans ses sigles en anglais) sont quelque-uns.
La méthode DACUM[8]
Dans notre cas, la méthodologie développée a été crée par une consultante[9], sur la base d´une adaptation de l´outil DACUM (Developing a Curriculum / Développer un Curriculum). Il s´agit d´une méthode très utilisée, d´analyse occupationnelle orientée à l´obtention des résultats d´application immédiate dans le développement de curriculum de formation. Elle a été particulièrement développée au Canada.
Cette méthode, considérée comme innovatrice et effective, se définit comme un outil rapide pour effectuer l´analyse occupationnelle à bas coût. Elle utilise la technique de travail en groupes formés par des professionnels et des travailleurs expérimentés dans l´occupation sous analyse. Pour utiliser DACUM dans un atelier, on forme des groupes de cinq à douze personnes, qui orientées par un coordinateur, décrivent ce qu´il faut savoir et savoir-faire dans le poste de travail d´une façon claire et précise.
Le résultat s´exprime dans la « lettre, carte ou matrice DACUM » où le poste de travail est décrit à partir des compétences et sous- compétences qui le composent.
Il faut remarquer qu´il peut exister une différence notable entre le concept de compétence avec lequel on aborde l´analyse fonctionnelle et celui utilisé par le DACUM. Pour celui-ci une compétence est la description de grandes tâches et en même temps, l´addition de petites tâches appelées sous- compétences. L´ensemble des compétences forment la description d´un poste de travail. Par contre, dans l´analyse fonctionnelle on ne décrit pas les tâches mais on identifie les résultats nécessaires pour atteindre le but clé.
Ainsi, les Matrices DACUM montrent des compétences décrites comme opérations ou tâches. Elles incluent aussi les connaissances nécessaires, les comportements, conduites, équipes, outils, matériel à utiliser et optionnellement le développement futur d´un poste de travail. Voyons un exemple appliqué au cas du Juge de Première Instance et Instruction :
CARTE FONCTIONNELLE GROUPE 1
Fonction |
Description de la fonction |
A |
Planifier les activités judiciaires et les assignations des procédures orales en considérant leur urgence, importance, complexité procédurale et ordre d´entrée ainsi que les ressources disponibles, de façon à assurer une réponse judiciaire adéquate. |
B |
Célébrer les procédures et les audiences programmées, en analysant le dossier, les preuves et les mesures proposées et en étudiant les questions conflictuelles posées ou qui puissent se poser, en cherchant l´information juridique applicable aux possibles situations. |
C |
Célébrer les procédures et les audiences en fonction du calendrier marqué, en dirigeant les débats en conditions d´ordre et avec un langage compréhensible. |
D |
Dicter des résolutions motivées facticement et fondées juridiquement, en résolvant toutes les questions posées par les parties. |
E |
Diriger et organiser stratégiquement et superviser les procédures judiciaires, en faisant la minute des questions posées dans les dossiers et en coordination avec le Secrétariat Judiciaire pour la réalisation du travail en équipe. |
F |
Enquêter les causes pénales, en pratiquant les actes nécessaires, prenant la déposition des témoins, imputés, experts, etc. en assurant les droits des justiciables et la rigueur dans les interventions. |
G |
Organiser et réaliser le tour de garde judiciaire, en résolvant toutes les situations qui se présentent avec diligence et rigueur compte tenu de l´importance et de l´urgence de l´affaire. |
H |
S´occuper de tous les professionnels liés aux activités judiciaires en facilitant l´accès à la justice |
TÂCHES
Fonction A |
Planifier les activités judiciaires et les assignations des procédures orales en considérant leur urgence et leur importance, et les ressources disponibles, de façon à assurer la rapidité dans la réponse judiciaire
|
|
Tâches |
||
1 |
Évaluer la complexité des affaires. |
|
2 |
Assigner à chaque tâche un jour et une heure déterminés, en considérant les différentes tâches à réaliser pendant la semaine. |
|
3 |
Signales les actes procéduraux ou donner des règles pour le signalement compte tenu de la durée, ainsi que du temps nécessaire pour dicter la résolution correspondante. |
|
4 |
Communiquer la planification au personnel. |
|
5 |
Assigner aux fonctionnaires les tâches à réaliser. |
|
6 |
Contrôler périodiquement l´accomplissement des tâches assignées. |
|
7 |
Prévoir les incidences exceptionnelles. |
|
8 |
Eviter que le rythme de signalements puisse supposer une accumulation des affaires. C´est à dire que le même nombre d´affaires qui rentrent doivent sortir, et donc il faut que le module d´entrée soit possible d´assumer. |
|
9 |
Prendre en considération les permis, les licences et les congés du juge et du greffier. |
|
10 |
Générer des indicateurs de suivi des tâches et de l´obtention des objectifs. |
|
Les Compétences Professionnelles
En partant de cette analyse occupationnelle comme prémisse, le pas suivant est définir les compétences professionnelles nécessaires pour développer les fonctions et les tâches décrites. Par conséquent, une fois définie la carta fonctionnelle (qui nous indique quoi et comment nous réalisons les fonctions et les tâches) les questions suivantes se posent :
Qu´est-ce qu´il faut faire |
= |
Connaissances |
Qu´est-ce qu´il faut savoir-faire |
= |
Habiletés |
Comment est ce qu´il faut être ou savoir être |
= |
Attitudes |
Pour faciliter ce travail, en particulier en ce qui concerne les attitudes, on a présenté aux groupes de travail experts une liste de compétences, en utilisant les instruments conçus pour cela, dans ce cas, par l´Institut National de Qualifications Professionnelles (INCUAL) du Ministère de l´Éducation et de
Fruit des groupes de travail, on a définit et regroupé la liste des compétences entendues comme l´ensemble des aptitudes, connaissances, habiletés et attitudes formulées en termes de conduites ou habitudes mises en marche qui sont demandés au Juge de Première Instance et d´Instruction, car elles ont une relation démontrée avec l´obtention et le succès des objectifs de la propre organisation.
Comme cadre de référence pour ordonner et classer les différentes sous- compétences on a établit les 5 groupes de compétences suivants :
1.
Techniques:
Le juge doit avoir une large connaissance technique juridique et procédurale et doit également maîtriser l´expression écrite comme outil de sa production professionnelle.
2.
De relations:
Le juge doit maîtriser les relations interpersonnelles avec les accusés, les citoyens, les professionnels, les institutions,
etc.
3.
Fonctionnelles:
Le juge doit avoir les outils d´organisation et de planification de son travail et de celui des autres. Il doit savoir organiser l´information en prennent des décisions efficaces et efficientes pour atteindre les objectifs de gestion.
4.
D´analyse:
Le juge doit avoir des habiletés intellectuelles d´analyse et de synthèse pour réaliser efficacement les tâches et les fonctions assignées, ainsi qu´un raisonnement verbal pour exprimer ses résolutions.
5.
Personnelles:
Le juge doit avoir une série de qualités personnelles qui lui fasse capable de développer correctement sa fonction. Il doit avoir un grand sens éthique, il doit être capable d´apprendre et de se mettre è jour constamment, il doit être flexible et doit rester intégré dans la communauté pour laquelle il travaille.
Et à l´intérieur de ces cinq grands groupes on a définit les 17 sous-compétences qui établissent de façon détaillée le Profil nécessaire pour devenir Juge de Première Instance et d´Instruction. :
1.
Capacité technique juridique et procédurale: Démontrer une connaissance solide des concepts, outils ou méthodes techniques de sa profession et une préoccupation pour maintenir ou améliorer son efficacité. Avoir la capacité de mettre en pratique ses connaissances dans l´exercice de ses fonctions.
2.
Expression écrite: S´exprimer à l´écrit avec correction grammaticale, de façon compréhensible et avec rigueur juridique, en assurant l´efficacité communicative et les principes de cohérence et cohésion des textes.
3.
Gestion du confit: Reconnaître les possibles conflits. Traiter les personnes et les situations difficiles avec de l´équilibre et de la sensibilité, respecter leurs expectatives et leurs charges et chercher des solutions justes et compréhensibles
4.
Écoute active: Faire complètement attention à ce que l´autre dit, comprendre le sens de se qu´il écoute dans le contexte réel.
5.
Empathie: Capter et comprendre les préoccupations, les intérêts et les sentiments des autres et y répondre convenablement.
6.
Travail en équipe: Capacité de participer, collaborer de se coordonner activement dans un groupe de travail. Disposition pour s´intégrer et faire que les autres s´intègrent aussi en favorisant la participation et la cohésion interne pour atteindre les objectifs en commun.
7.
Direction de personnes et d´équipes: Capacité de diriger des équipes de travail en réussissant à faire que les collaborateurs contribuent de façon effective dans l´obtention des objectifs. Résoudre efficacement des faits et des situations conflictuelles en favorisant le développement et la motivation des personnes.
8.
Planification et organisation du travail: Définir les priorités, établir les plans d´action nécessaires pour atteindre les objectifs marqués ; distribuer les ressources et établir les mesures de contrôle et de suivi.
9.
Prise de décisions: Capacité de choisir, parmi différentes alternatives, celles qui sont les plus adéquates pour l´obtention des résultats et adéquates au cadre légal en vigueur. Evaluer les effets que les décisions prises auront.
10.
Gestion de l´information: Capacité pour obtenir et traiter l´information qui doit se transmettre ou emmagasiner de façon efficace et efficiente.
11.
Raisonnement analytique: Comprendre les situations, les décomposer dans leurs éléments substantiels, en délimitant les faits et en résolvant les problèmes avec une analyse des parties et une réflexion logique et systématique.
12.
Raisonnement synthétique: Comprendre les situations globalement et résoudre les problèmes à partir de l´union des parties qui les composent.
13.
Raisonnement verbal: Exprimer clairement des idées ou des faits avec correction grammaticale. Se faire comprendre, expliquer avec clarté le point de vue personnel en motivant les causes des décisions.
14.
Fiabilité et intégrité: Agir systématiquement avec impartialité et cohérence avec les principes et valeurs qui informent le système constitutionnel espagnol.
15.
Flexibilité: Modifier le comportement pour l´adapter à des situations de changement ou d´ambiguïté et maintenir l´effectivité dans les différents environnements, avec des tâches, des responsabilités et des personnes différentes.
16.
Apprentissage permanent: Obtenir ou élargir la connaissance et les techniques liées au travail judiciaire. Capter et appliquer des informations, systèmes et méthodes de travail nouveaux.
17.
Compréhension et intégration sociale: Connaître la réalité sociale de son domaine d´intervention. Être informé sur l´actualité. Comprendre les relations institutionnelles et sociales.
Tableau Résumé:
TECHNIQUES |
1.
Capacité technique, juridique et procédurale
2.
Expression écrite |
DE RELACION |
3.
Gestion du conflit
4.
Écoute active
5.
Empathie
6.
Travail en équipe
7.
Direction de personnes et d´équipes |
FONCTIONNELLES |
8.
Planification et organisation du travail
9.
Prise de décisions
10.
Gestion de l´information |
D´ANALYSE |
11.
Raisonnement analytique
12.
Raisonnement synthétique
13.
Raisonnement verbal |
PERSONNELLES |
14.
Fiabilité et intégrité
16.
Flexibilité
17.
Apprentissage permanent
18.
Compréhension et intégration sociale |
Sur ce point et après avoir présenté cette liste de compétences professionnelles on peut maintenant parler et définir plus précisément et de façon plus objective, le profil professionnel qu´un « bon Juge » dans le cas de
Logiquement même si la description du profil est détaillée, on trouvera toujours des aspects de pondération difficile, soit par la complexité de la fonction ou par les traits caractéristiques du Juge lui-même, mais on dispose au moins d´un cadre de référence, d´un standard clairement exigible.
Enfin, Dans le développement méthodologique de l´outil DACUM, on crée un groupe de validation d´experts, formés par des juges seniors, spécialistes en ressources humaines, et des juristes de prestige reconnu, dans le but de réviser, mettre à jour et valider le Profil des compétences élaboré à partir de travail des groupes. Dans notre cas on a constitué un Groupe de Validation avec les membres mentionnés car on manque d´une structure d´organisation comme dans d´autres domaines de l´administration publique, qui apporte une vision stratégique et de futur nécessaire pour la construction d´un profil de compétences ambitieux.
Le profil du Juge Stagiaire[11]
Le profil de l´élève qui arrive, chaque Promotion depuis 1997 à l´École Judiciaire est celui d´une jeune fille (63,45% sont des femmes et 36,55% des hommes), de 29 ans, avec des connaissances théoriques tirées des études de la carrière universitaire et ensuite de la préparation d´un examen- concours qu´elle a étudié pendant 4 ans et 1 mois.
Quatre ans, avec une moyenne de 8 heures d´étude par jour, en faisant sort périodiquement à un préparateur. Celui-ci est une figure clé par excellence dans notre système de préparation d´examen- concours ; cette personne devient avec les années, un maître, un exemple, un tuteur, un confident, un père spirituel et quelques fois un ami ; parfois le seul contact social du candidat[12].
Voilà donc la situation à partir de laquelle il faut fixer les finalités de leur formation initiale. Ensuite, on présentera sommairement quelques traits et réflexions sur le profil des Juges Stagiaires ;
·
Le 70% n´a jamais travaillé, le 14% a travaillé dans le secteur juridique. On a dit que le candidat met une moyenne de 4 ans pour réussir la phase de l´examen- concours pour être admis à l´École. On sait bien que la préparation de l´examen, en lignes générales est pratiquement incompatible avec n´importe quel autre type d´activité, comme le démontrent les statistiques. Par conséquent, ce type de candidat est normalement dépendant de sa famille, économique et personnellement, avec tout ce que cela implique de manque de ressources d´autogestion personnelle. Le manque d´expérience de travail entraîne également d´autres déficits importants en ce qui concerne l´obtention des habiletés personnelles et sociales pour se débrouiller dans les organisations ; travail en équipe, ressources de communication, prise de décisions, etc.
·
Le 92% n´a jamais publié un travail ou étude juridique. Comme on a dit, à la fin de la carrière universitaire de droit, les Juges stagiaires ont passé une moyenne de 4 ans à étudier, ce qui est incompatible avec n´importe quelle autre activité, même de type scientifique ; obtenir le doctorat, étudier à l´étranger, rechercher ou publier des travaux. Quoique cette donnée ne soit pas concluante, elle nous donne quelque indication du fait que les études qu´ils font sont absorbantes et leur seul but est de « retenir » l´information dans la mémoire pour la préparation des épreuves. Il s´agit en plus d´une étude individuelle, absolument herméneutique et introspective.
·
Le 40% n´a pas des connaissances d´informatique. On n´a pas les données concrète pour réaliser une comparaison sur le niveau des connaissances d´informatique parmi les jeunes de 29 ans et celui des Juges stagiaires, quoiqu´on a un indicateur indirect qui peut fait penser qu´ils ont un niveau similaire à celui de la moyenne espagnole. On sait que le pourcentage des ménages équipés avec un ordinateur (de table, portable et agenda électroniques) augmente de plus en plus, et était de 58,4% en décembre 2006, d´après les résultats de l´enquête sur équipement publiée par l´Institut National de Statistiques. Par conséquent, en lignes générales, il serait logique de penser que si un 60% des ménages espagnols dispose d´ordinateurs, sur ce même pourcentage on pourrait établir le niveau de connaissance de l´utilisation parmi ses habitants. Il faudrait ajouter cependant que chez un collectif avec ce niveau professionnel, on devrait espérer une connaissance informatique supérieure parmi ses membres, mais rappelons que le système d´étude de l´examen- concours est simplement de lecture de programmes et de volumes législatifs aux effets de les mémoriser, ce qui fait que l´utilisation des systèmes informatiques ne soit pas nécessaire.
·
Le 66% parle anglais et un 19% français. Comme dans le paragraphe antérieur ces données sont par-dessous de celles qu´on trouve chez un professionnel du même âge dans un niveau social et de travail similaire.
·
Le 75% n´a pas un parent dans le secteur juridique et le 6% a un parent Magistrat. Cette donnée met la fin au cliché, très généralisé, que la carrière judiciaire est endogamique et normalement héréditaire de « pères aux fils ». Les données sont accablantes, révélatrices et parlent par elles-mêmes.
·
En ce qui concerne les valeurs ou les compétences qu´on pourrait encadrer dans les personnelles, on veut remarquer quelques données:
§
99% Apprécie la fonction garante des droits fondamentaux
§
95% Reconnaît aimer le droit
§
89% Apprécie l´indépendance et l´impartialité de sa fonction
§
67% Apprécie la stabilité dans le poste comme motivation
§
50% Apprécie les conditions économiques de la profession
·
De ces données on peut tirer, en lignes générales que le composant vocationnel de la profession de juge est considérable, dans un pourcentage très important et que les aspects plus pratiques comme la stabilité et la rétribution économique sont par derrière â une certaine distance.
Comme conclusion
J´ai déjà commenté pendant la présente communication que, en lignes générales, à leur admission dans l´École Judiciaire, les Juges Stagiaires n´ont pas les compétences pour l´exercice de la fonction juridictionnelle. Les Juges Stagiaires présentent un très haut niveau de connaissances juridiques, comme ils l´ont démontré dans la phase antérieure de l´examen- concours mais présentent également un certain déficit de certaines habiletés, attitudes et intérêts compatibles avec le correct exercice de leur fonction. En définitive, il s´agit de fournir le futur Juge des outils nécessaires pour un exercice de leur office correct et convenable, mais pour cela il faut connaître cet office et le profil que le professionnel doit avoir pour pouvoir l´exercer avec des garanties.
La méthodologie de la science appliquée à l´ingénierie de la formation nous offre différents outils pour pouvoir décrire de façon détaillée les fonctions et les tâches d´un collectif ou domaine professionnel, définir les compétences nécessaires pour les exercer, planifier les actions pour introduire des éléments de correction et finalement, établir les mécanismes d´évaluation de l´accomplissement correcte de l´exercice.
Dans le cas qui nous occupe nous avons exposé la méthode des Profils professionnels comme un instrument contrasté par le diagnostique des besoins de formation, appliqué au domaine professionnel des Juges.
Il est vrai qu´il y a une tendance à considérer la formation comme le remède aux maux qui affectent l´administration de la justice en général et les Juges en particulier. En Espagne la crédibilité du fonctionnement des Tribunaux de Justice n´arrive pas à la moyenne avec un 4.1 sur 10, note qui est en dessous de celle du reste des administrations publiques étudiées[13]. Comme dit Gómez[14]; “Ni le manque de formation est à l´origine de tous les maux ni une formation adéquate est la solution à tout. De la même façon la formation des Juges est une contribution seulement partielle à une justice de qualité… “, ce qui indiscutablement est une contribution.
Andreu Estela Barnet
Chef du Département des Relations Externes et Institutionnelles
École Judiciaire du CGPJ
[2]
Mevlana Jalaluddin, R. (1996) 150 contes sufis. Editions Paidós Ibérica. Barcelone (Espagne).
[4]
Llorens Gumbau, S. (1997) Détection des nécessités formatives: Une classification des instruments. Deuxièmes Journées de développement de
[5]
Rallo Ayezcuren, M. (2007) Séminaire L´Enseignement dans
[6]
Vidal Andreu, G. (2006) Juges largement préparés. Article publié dans le journal El País, le 16 janvier 2006.
[7]
Comme exemple de cette affirmation voyons un paragraphe des conclusions du Cours sur Politique de Sélection de Juges, qui a eu lieu au début du mois d´octobre de cette année, organisé par le Département de Formation Continue du CGPJ à Madrid: “Il s´agit de sélectionner le juge qui arrive sans des conditionnements étrangers à sa propre capacité et qui mérite sa désignation parce qu´il réunit des qualités comme l´indépendance et la neutralité avec les parties du procès, parce qu´il est un gardien fidèle des valeurs et des principes constitutionnels; et qu´il a des habiletés non opérationnelles pour décider prudemment en motivant ses résolutions avec clarté et logique, avec expertise et tempérament pour exercer la jurisdiction”.
[8]
40 questions sur la compétence au travail. Organisation Internationale du Travail. Centre Inter.- américain pour le Développement des Connaissances dans
[9]
L´étude du Profil de Compétences des Juges de Première Instance et d´Instruction a été réalisée par Rafael Folk Gilsanz et Gloria Sánchez Roca de l´entreprise Xarxa Consultores, à la demande du Centre des Études Juridiques et de Formation Spécialisée du Département de Justice du Gouvernement de
[10]
Canquiz Rincón, L. (2002) Tendances dans le dessin de profils professionnels. Communication présentée à l´occasion de
[11]
Les donnés ici présentées sont la moyenne des données accumulées des Juges Stagiaires qui ont passé par l´École Judiciaire depuis la 48ème è la 59ème Promotion, c´est à dire, 12 promotions avec un nombre un total de 1896 élèves.
[12]
Vidal Andreu, G., Op. Cit. Page. 2.
[13]
Toharia Cortés, J. J. (2005)
Opinion Publique et Justice. L´image de
[14]
Gómez Martínez, C. (2001) Les raisons de